Vous vous en souvenez, pendant la crise sanitaire, les établissements de tous statuts avaient tissé des coopérations étroites pour faire face, ensemble, à la pandémie et soigner au mieux les populations. En cela, ils avaient répondu aux attentes des pouvoirs publics, qui à juste titre appellent régulièrement de leurs vœux de telles collaborations. Logiquement, le « Ségur de la Santé » avait porté une considération plutôt équilibrée de l’ensemble des contributeurs, qu’ils soient publics ou privés.
Après la crise sanitaire, cela n’a pas été un long fleuve tranquille pour autant. Il s’est avéré indispensable de faire perdurer cet esprit d’unité au fil des tensions saisonnières et des soubresauts, de moins en moins conjoncturels, révélateurs des failles de notre système. Les hôpitaux et cliniques privés ont continué à jouer pleinement le jeu, parce que telle est, tout simplement, notre mission, et que leurs professionnels de santé, infirmier.e.s, aides-soignant.e.s… sont pleinement engagés.
Ce sont des femmes et des hommes qui soignent et prennent soin, dans des conditions parfois difficiles au regard des pénuries de ressources humaines ; qui, comme à l’hôpital public, sont susceptibles de travailler la nuit, le week-end, les jours fériés ; qui subissent, eux aussi, l’érosion de leur pouvoir d’achat. Et pourtant, alors même que l’on parle d’améliorer l’attractivité des métiers de la santé, les mesures de revalorisation salariale présentées par Elisabeth Borne le 31 août dernier ne leur sont pas destinées…
Je ne suis pas sûr que les citoyens soient bien conscients de cela : en effet, comment comprendraient-ils que celles et ceux qui les soignent soient moins bien traités en fonction de leur lieu d’exercice, eux qui – les études d’opinion le montrent bien – ne se préoccupent guère du statut, public ou privé, mais aspirent seulement à être pris en charge de la meilleure façon possible ?
Une chose est certaine : quelle que soit la bonne volonté des acteurs (et notre Fédération est toujours constructive), ce genre de signal est délétère, qui plus est à un moment où les pouvoirs publics appellent à un engagement de tous autour de la permanence des soins. Notre système de santé a besoin pour mieux fonctionner d’une harmonisation des conditions salariales de l’ensemble des soignants.
Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale qui arrive bientôt en discussion porte la responsabilité de rétablir des éléments d’équité pour renforcer l’unité du système de santé ; de ne pas être qu’un énième exercice comptable, ou pire un plan d’économie, mais de témoigner d’une compréhension fine des difficultés du système de santé et des besoins des professionnels, en y apportant les réponses justes ; en bref, de ne surtout pas être aux yeux des acteurs une occasion manquée, mais une véritable avancée pour le système de santé.
Lamine Gharbi